J’ai été des années durant intéressée par l’idée d’introduire des personnages anonymes dans des univers décalés…
Puis je suis venue aux chiffres, aux nombres, après les avoir longtemps détestés; mais au-delà de leur application dans des domaines très matérialistes, je me suis intéressée au fait qu’ils étaient porteurs de mémoire(s), tant individuelle(s) que collective(s). Ils sont une ponctuation tout au long de l’existence.
Ils sont donc devenus la base de mon travail. Je les accapare, à travers des énumérations, des opérations totalement improbables. Je détourne leur sens, leur vocation. Tout ceci forme une trame que je rends plus ou moins présente/absente et à laquelle j’associe le travail de l’encre et de l’eau; à partir de là s’opèrent de multiples allers-retours. Les nombres, les chiffres, deviennent des traces, sorte de palimpseste dans lequel s’affrontent, se juxtaposent, se dissolvent ou cohabitent toutes les mémoires possibles. J’étire l’espace dans lequel j’introduis le désordre, le chaos mais aussi le silence, l’immobilité. J’introduis également des lignes récurrentes et/ou transgressives qui parfois plongent dans le vide.
Je tente juste de raconter une histoire qui interroge le temps.